Une facette importante des travaux de notre labo est l’étude de la voix, de la parole et de la résonance, les composantes sensorimotrices du langage, ainsi que de leur vieillissement.

Pour étudier ces processus, les personnes participant à nos études font des tâches variées dans notre salle insonorisée (figure 1), une pièce spéciale où le bruit ambiant est très faible, permettant d’effectuer des enregistrements de voix de qualité.

Figure 1. La salle insonorisée de notre laboratoire.

Mais concrètement, comment étudier la voix et la parole ? Pour bien comprendre, il faut d’abord connaître les composantes de la parole. Imaginez une trompette (figure 2) ! Son embouchure permet au musicien ou à la musicienne de souffler dans l’instrument grâce au contrôle de sa respiration. L’air qui passe à travers le tube replié de la trompette et qui sort du pavillon produit des sons — la voix. Souffler dans la trompette ne suffit pas ; le ou la trompettiste doit aussi modifier le positionnement de ses lèvres pour générer les sons désirés, de la même façon que nous faisons vibrer nos cordes vocales pour produire notre voix. C’est la phonation. Plus les cordes vocales sont étirées, plus le son sera aigu ; plus elles se ferment fortement, plus le son sera fort. Pour contrôler la voix, il faut donc contrôler les cordes vocales. 

Figure 2. Analogie entre la production de la parole et la production de sons avec une trompette.

Pour produire les consonnes et les voyelles qui composent le langage, il faut aussi bouger rapidement et précisément nos lèvres, notre langue et le voile du palais, tout comme le musicien ou la musicienne doit appuyer sur les différents pistons de l’instrument pour créer les notes de la partition. C’est l’articulation. Finalement, pour produire un son nasal, par exemple « an », il faudra abaisser le voile du palais et laisser passer l’air par le nez ! C’est la résonance, aussi appelée nasalisation (figure 3).

Figure 3. Positionnement des articulateurs lors de la production des sons A) « a » et B) « an ».

Ces 4 éléments (respiration – phonation – articulation – résonance) sont essentiels à la production de la parole.

Ce sont ces mêmes éléments qui sont étudiés dans le cadre de projets de recherche au sein de notre labo à travers des tâches parfois originales ! Voici quelques exemples de tâches réalisées par les participants et participantes de nos études dans notre salle insonorisée, une pièce qui permet de diminuer le bruit ambiant et de produire des enregistrements sonores de qualité. Pour mesurer la capacité respiratoire au repos, vous pourriez être enregistrés en train de tenir un son, comme la voyelle « a », le plus longtemps possible. Pour mesurer le contrôle vocal (phonation), nous pourrions vous demander de passer d’un « a » le plus grave possible à un « a » le plus aigu possible. Et l’articulation ? L’une des tâches utilisées par notre labo est la diadococinésie orale (ou « diado » ou « DDK » en anglais). Cette tâche est heureusement plus simple que son nom ne l’indique, mais vous pousse à votre limite ! Il s’agit de prononcer une suite de syllabes plus ou moins simples, telles que « pa-ta-ka » (très facile), pra-tra-kra (moins facile) ou encore prat-trat-krat (vraiment pas facile), le plus rapidement possible. Cela demande un véritable effort de planification au niveau moteur pour programmer la vitesse et l’enchaînement de ces mouvements, notamment. Une autre tâche que nous utilisons souvent consiste en la répétition (ou lecture) de non-mots, c’est-à-dire des mots sans signification, p. ex. « difeli », dont la complexité articulatoire peut être manipulée. Votre articulation peut ainsi être évaluée avec des mesures de votre temps et durée de réponse ainsi que sur la justesse des sons produits par rapport aux sons demandés.

Nous faisons généralement appel à la base de données du français québécois oral que nous avons créé — SyllabO+ — pour choisir les stimuli (syllabes, non-mot) que nous utilisons dans nos tâches de parole. Ceci nous permet de choisir des syllabes de fréquences différentes, sachant que plus une syllabe ou un mot est fréquent, plus il est facile (et rapide) à produire ! Donc, nos stimuli sont généralement manipulés sur au moins deux paramètres : leur complexité articulatoire et leur fréquence d’utilisation.

Toutes ces tâches, et bien d’autres encore, sont des outils nous permettant d’étudier les aspects sensorimoteurs du langage. Lorsque jumelées à des techniques de neuroimagerie ou de neurostimulation, ces tâches nous aident à mieux comprendre les fondements neurobiologiques de la parole. Non, on ne s’ennuie pas à notre labo  !

Pour en savoir plus :

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