Qu’est-ce qui compose la substance grise et la substance blanche ? Quelles sont les différences entre les deux ?
 
Texte 2 de 3 de la série sur le cerveau humain.
 

Après notre billet sur l’anatomie du système nerveux central (SNC), nous présentons dans ce billet la substance grise et la substance blanche (aussi appelées matière grise et blanche), composantes essentielles du système nerveux.

La substance grise et la substance blanche se retrouvent dans tout le SNC, soit dans le cerveau, le cervelet et la moelle épinière. Ces deux substances ne sont pas très différentes sur le plan cellulaire. Elles sont toutes les deux composées de milliards de neurones ou de parties de neurones (il est estimé que le cerveau humain est composé d’environ 100 milliards de neurones). Elles ont toutefois des rôles très différents ! La substance blanche possède essentiellement un rôle de transport d’influx nerveux et la substance grise a comme fonction de traiter l’information.

La substance blanche est essentiellement composée d’axones myélinisés, c’est-à-dire d’axones qui possèdent une gaine de myéline. C’est cette gaine, de couleur blanche, qui donne son nom à la matière blanche. La substance blanche n’est pas organisée de la même façon dans tout le SNC. Au niveau du cerveau et du cervelet (Figure 1B), elle est située au centre, et entourée de la substance grise. Au contraire, au niveau de la moelle épinière, la substance blanche est située autour de la matière grise (Figure 1C). La longueur des axones diffère selon la fonction du neurone. Par exemple, les axones des neurones de projection ont généralement une longueur allant de quelques millimètres à 1 mètre tandis que les axones des neurones qui communiquent sur de petites distances sont plus courts, soit moins de quelques millimètres.

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Figure 1. A) Illustration du plan transversal (horizontal), en jaune. B) Vue transversale d’une image IRM de cerveau prise par le Laboratoire des neurosciences de la parole et de l’audition. C) Schéma d’une vue transversale de la moelle épinière (Canva).

Dans le cerveau, les axones qui composent la substance blanche se regroupent pour former des structures ressemblant à des nerfs, qui portent le nom de fibres ou de faisceaux (le terme nerf étant réservé au système nerveux périphérique). Ces faisceaux relient différentes zones du cerveau. Il en existe plusieurs types :

1. Faisceaux d’association. Ces regroupements d’axones communiquent de l’information entre les différentes régions d’un même hémisphère cérébral. On distingue 3 types de faisceaux d’association. (1) Les fibres d’association longues qui restent confinées à la même région (par exemple dans l’aire motrice) ou traversent plus profondément la substance blanche d’un même hémisphère (comme le faisceau arqué). (2) Les fibres d’association courtes, qui ont une forme ressemblant à un U, et qui permettent la communication entre des régions adjacentes. (3) Les fibres d’association voisines qui communiquent généralement entre les différentes régions d’un même lobe cérébral (par exemple dans le lobe temporal).

2. Faisceaux commissuraux ou interhémisphériques. Les faisceaux commissuraux transmettent de l’information entre les deux hémisphères cérébraux. Par exemple, le cortex prémoteur de l’hémisphère droit et le cortex prémoteur de l’hémisphère gauche communiquent à travers un faisceau commissural appelé le corps calleux. On retrouve également d’autres faisceaux interhémisphériques, soit la commissure antérieure, la commissure postérieure et la commissure de fornix (Figure 2).

Figure 2. Illustration des faisceaux commissuraux adaptée de l’image originale Brain Model par biologycorner sous licence CC BY-NC 2.0.

3. Faisceaux de projection. Ces faisceaux de longues portées connectent des aires cérébrales très distantes, comme le cortex et le thalamus (radiations thalamiques), le cortex et le tronc cérébral et la moelle épinière. On catégorise les faisceaux de projection en deux types : (1) les faisceaux moteurs, qu’on appelle aussi descendants, qui transmettent de l’information du cerveau vers le reste du corps, et (2) les faisceaux sensitifs, qu’on appelle aussi ascendants, qui envoient les signaux captés par les récepteurs sensoriels du corps vers le cerveau. Les faisceaux de projection passent par une large bande qui porte le nom de capsule interne (Figure 3), laquelle est située sous le corps calleux. Les neurones étant unidirectionnels, ils ne peuvent être impliqués que dans un seul type de faisceau (montant ou descendant).

La substance grise est composée d’une diversité plus importante de parties de neurones, mais également d’autres types de cellules. On y retrouve ainsi les corps cellulaires des neurones et leurs dendrites, des axones qui ne possèdent pas de gaine de myéline, des terminaisons nerveuses ainsi que des cellules gliales. Les cellules gliales, aussi nommées névroglie, sont une collection de types cellulaires avec diverses fonctions (principalement de supporter et protéger les neurones), mais qui ne transmettent pas d’influx nerveux. Les cellules gliales de la substance grise comprennent notamment des astrocytes protoplasmiques qui ont une forme d’étoile à courts prolongements et qui joueraient entre autres un rôle de modulation de la transmission synaptique. Elles incluent aussi les microglies et les cellules de Schwann.

La couleur grise de la substance grise est due à deux facteurs : la faible présence de myéline et la présence de corps de Nissl, des structures situées principalement dans le corps cellulaire des neurones, et qui ont une couleur grise.

Dans le cerveau et le cervelet, la substance grise se situe principalement à la surface et forme respectivement le cortex cérébral et le cortex cérébelleux (Figure 1B). On retrouve également de la substance grise au cœur du cerveau. Les régions de substance grise situées en profondeur portent le nom de noyaux gris centraux ou ganglions de la base (Figure 3). Les noyaux sont au nombre de six, trois dans chacun des hémisphères cérébraux. Dans chaque hémisphère, deux des trois noyaux sont situés à côté du thalamus, soit le globus pallidus et le putamen. Ces deux noyaux sont souvent regroupés sous le nom de noyau lenticulaire. Le troisième noyau est le noyau caudé. En forme de longue virgule, il « entoure » le noyau lenticulaire (Figure 3). Les noyaux gris centraux reçoivent des influx nerveux provenant de tout le cortex et transmettent de l’information à tout le cortex à travers des circuits appelés boucles cortico-sous-corticales. Les noyaux gris centraux ont de nombreuses fonctions. Ils contribuent à la préparation et à l’initiation des mouvements volontaires (par exemple, parler ou saluer avec la main), à l’apprentissage moteur, et à la régulation de la posture (tonus musculaire, posture, rigidité). Une autre fonction des noyaux gris centraux est qu’ils sont impliqués dans la régulation de la récompense et du dégoût. Ils sont également associés à différentes fonctions cognitives, comme l’attention, la sélection et l’inhibition des actions, et la conscience.

Figure 3. Illustration des ganglions de la base, du thalamus et de l’amygdale (vues transversales à gauche et vues coronales à droite), adaptée de l’image originale Basal Ganglia Circuits par Mikael Häggström sous licence CC BY-SA 3.0.

Les ganglions de la base communiquent avec plusieurs structures du cerveau. Parmi ces structures, on retrouve le thalamus (Figure 3), où la majorité des influx nerveux sensitifs, dont ceux qui proviennent de tout le corps, transitent avant de se rendre dans d’autres régions du cerveau. Le thalamus est impliqué dans la perception de la douleur, de la température et de la pression. Le thalamus est également impliqué dans les fonctions motrices, en permettant la communication entre le cervelet et les noyaux gris centraux et les aires motrices primaires et prémotrices, formant ce que l’on appelle les boucles de contrôle cortico-sous-corticales. Les axones impliqués dans la communication entre le thalamus et le cortex passent par la capsule interne (Figure 4).

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Figure 4. Schéma des connexions impliquant les ganglions de la base.

Les ganglions de la base communiquent également avec l’amygdale (Figure 3), laquelle possède de nombreuses fonctions. L’amygdale est en effet impliquée dans la régulation de l’anxiété, de la peur, de la mémoire émotive et de la cognition sociale (laquelle désigne l’ensemble des processus cognitifs impliqués dans les interactions sociales). L’information en provenance de l’amygdale est notamment relayée au cortex par le thalamus. Une autre structure liée aux ganglions de la base est la substance noire ou substantia nigra, qui est formée de matière grise. Avec les noyaux gris centraux, elle contribue à moduler les mouvements et les fonctions de récompense (p. ex. motivation à réaliser des actions liées à la survie, comme la recherche de nourriture). Finalement, les noyaux sous-thalamiques, formés de matière grise profonde (Figure 3) interagissent également avec les ganglions de la base. Avec les ganglions de la base, les noyaux sous-thalamiques participent à la régulation des mouvements.

Au niveau de la moelle épinière, la substance grise est située au centre et entourée par la substance blanche. L’espace occupé par la substance grise ressemble à un papillon (Figure 1C). La substance grise de la moelle possède 4 cornes, 2 dorsales et 2 ventrales, qui permettent l’entrée et la sortie des influx nerveux de la moelle épinière. L’influx nerveux transporté par les nerfs sensitifs pénètre dans la moelle au niveau des cornes dorsales. L’influx nerveux transporté par les nerfs moteurs quitte la moelle par les cornes ventrales et achemine les commandes aux muscles pour l’exécution des mouvements.

Maintenant que nous avons discuté de l’anatomie du cerveau, nous sommes prêts à aborder son organisation fonctionnelle, c’est-à-dire la façon dont il est organisé pour diriger des fonctions aussi diverses que marcher, entendre ou parler. Le prochain et dernier billet de cette série portera sur ce vaste thème qu’est l’organisation fonctionnelle du cortex cérébral.

Ouvrages de référence ayant servi à la rédaction de ce billet :

Tortora, G. J., & Derrickson, B. (2007). Principes d’anatomie et de physiologie (M. Forest & L. Martin, Trans. 2e ed.) : ERPI.

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